Patrimonialisation et tourisme culturel : proposition de TD sur le processus de patrimonialisation et la relation au tourisme culturel effectuée en Tourisme et Territoire (BTS Tourisme), mais qui
28 jeudi Fév 2019 Les activités préparatoires Ces activités visent à vous accompagner dans l’acquisition des connaissances de base afin de vous permettre d’être plus efficaces en classe. Cliquez sur l’image ci-dessous et laissez-vous guider… Plan de travail TS Ce plan de travail a pour objectif de vous accompagner dans l’avancement du chapitre en vous rappelant les objectifs en termes d’acquisition des connaissances et des compétences. Réviser le cours En cliquant sur l’image ci-dessous, vous accédez à une sélection de ressources en lignes gratuites pour compléter et réviser votre cours.
Faceaux conflit du passé, la démarche historienne visant l'objectivité entre-t-elle toujours en contradiction avec le travail de mémoire, par définition, subjectif ? Mémoires : souvenirs
Dans le cadre du concours commun 1 A de Sciences Po 2017, le thème de la Mémoire nous impose de voir les liens entre celle-ci et l’Histoire. Nous sommes dans des temps où Histoire et Mémoire se confondent quotidiennement dans une médiatisation et une spectacularisation », démesurées parfois, de tout ce qui a trait au passé. On peut citer à titre d’exemple les récents débats pendant la campagne présidentielle sur la décolonisation, le régime de Vichy, la rafle du Vel d’Hiv… Du bain télévisuel où se coulent indistinctement commémorations, documentaires et fictions, pour comprendre ce que représente la Mémoire, il paraît plus qu’urgent de dégager et d’isoler les éléments et de procéder à une remise au point terminologique afin d’en observer les liens même avec l’Histoire. Cette approche se veut donc philosophique, au sens où, de l’exploration des définitions et des concepts en présence, peut faire naître une analyse des problèmes qui en découlent. Les définitions ou concepts La Mémoire, les Mémoires… Les définitions ou concepts varient selon le singulier ou le pluriel du terme. Il faudra donc faire extrêmement attention au libellé du sujet…avec ou sans S ». La mémoire La mémoire est justement la faculté par laquelle on se souvient, on se rend présent à l’esprit, ou on maintient en lui, ce qui n’est plus. Le mot vient du latin memoria. Les grecs représentaient la Mémoire sous les traits de Mnèmosyne, divinité primitive, fille d’Ouranos et de Gaïa. De fait, la Mémoire est l’une des plus anciennes déesses de l’Humanité. Par ce mythe, on rappelle aussi que le désir de se souvenir, de retenir le temps qui passe ou de chercher celui qui est perdu est la source vive de la création artistique. La mémoire désigne ici aussi bien le processus par lequel l’esprit fait retour sur le passé pour se le représenter, que le résultat de ce travail ; aussi bien la faculté de représentation du passé, que la représentation elle-même. Mais la mémoire, faculté de se souvenir, ne s’oppose pas comme on le croirait peut-être un peu vite à l’oubli, faculté d’effacer, comme l’écrit justement T. Todorov dans Les abus de la mémoire Il faut rappeler une évidence c’est que la mémoire ne s’oppose nullement à l’oubli. Les deux termes qui forment contraste sont l’effacement l’oubli et la conservation ; la mémoire est, toujours et nécessairement, Les Mémoires C’est un genre littéraire qui relève de l’écriture de soi mais qui se distingue toutefois nettement de l’autobiographie, des confessions ou encore des souvenirs. Si l’autobiographie cherche à restaurer a posteriori la cohérence d’une vie, un parcours, un itinéraire, les confessions sont des aveux qui supposent des fautes et demandent au lecteur son pardon, les souvenirs enfin se présentent comme le recueil discontinu d’évènement passé que leur charge affective a rendu mémorables. L’Histoire L’Histoire est une notion problématique par elle-même, du seul fait de sa polysémie à savoir la diversité de ses acceptions. Elle peut désigner en effet Aujourd’hui, comme les confidences ont remplacé les confessions, les témoignages tiennent à présent lieu de Mémoires » et les journalistes jouent le rôle de mémorialistes ou, comme ils le disent eux-mêmes de chroniqueurs ». Les Mémoires ne retiennent du passé de leur auteur que ce qui a contribué au passage de l’Histoire. Les Mémoires sélectionnent la grandeur et invitent à saisir une expérience individuelle dans un destin collectif. D’une part la transformation dans le temps des sociétés humaines histoire de France…, et par extension des individus Histoire des pionniers…, mais aussi par une extension démesurée du concept d’à peu près tout ce qui est susceptible d’évoluer dans le temps histoire de l’anarchie…. D’autre part, c’est aussi le récit de cette transformation, sa tentative d’explication, dans un souci d’objectivité et de rigueur pour ce qui concerne la discipline historique proprement dite. Par suite, on parlera d’histoire dès qu’il s’agit de raconter quelque chose, qu’il s’agisse de réalité ou de fiction. Enfin, au pluriel, des histoires » désigne précisément des ennuis ou encore des problèmes issus de cette polysémie sont de nature et de degrés variables Tout d’abord, l’Histoire désigne aussi bien un processus que le récit qui en est fait ce que recouvre la distinction faite en allemand entre Historie et Geschischte. De plus, ce qui est plus gênant, il peut sembler énigmatique d’envisager sous le même terme le récit vérace et éclairé des événements du passé, et le récit fictif de la fable par outre le fait que l’on ait affaire dans les deux cas au récit précisément, et donc au langage, c’est la notion de représentation qui peut d’abord permettre de comprendre cette difficulté. La représentation Toute histoire, par son récit, donne une représentation d’événements, une image mentale de ce qui, précisément, n’est pas présent. L’Histoire cherche donc à rendre présents à nouveau des événements qui, étant passés, ne le sont plus. C’est ainsi fatalement qu’elle aura à faire avec la mémoire. C’est ainsi qu’Histoire et Mémoire semblent donc de prime abord, indissociables, comme autant de moyens de se rendre présent à l’esprit un passé qui n’est plus. Poursuivons donc notre article dans les concepts à travers la question précise de ces relations qu’entretiennent l’Histoire et la Mémoire. Mais il serait trop facile de penser que nous avons affaire ici à un couple d’amants, dont les relations sont d’autant plus ambivalentes que les notions elles-mêmes bien souvent infidèles comme l’oubli ou l’imagination, ou liées à d’autres notions comme les sulfureuses valeurs, morale, identité…. Or, il y a deux manières de ne pas être présent soit en n’étant pas du tout dans le cas des fictions, qui inventent des événements, soit en n’étant plus dans le cas de l’Histoire qui reconstruit ce qui est passé dans une représentation. Il faut donc, pour sauver l’Histoire, tiraillée entre deux définitions contradictoires, chercher ce qui a de commun entre ces deux récits. 2. Quelles relations entre Histoire et Mémoire De la communauté à la séparation Histoire et mémoire vivent ainsi sous le régime commun de notions, à l’intérieur duquel il faudra procéder à quelques distinctions. Toutes deux conduisent à des représentations du passé, ce qui amène à préciser la définition de l’Histoire. Faire l’Histoire n’est pas raconter des histoires » ; en effet, dans ce dernier cas, c’est le récit qui importe, plus que la véracité de son contenu. Or le récit historique est plus une relation d’événements passés censés avoir eu lieu, et une relation dans les deux sens du terme relater, c’est-à -dire retracer, retranscrire, refaire connaître, mais aussi mettre en relation ces événements pour en montrer la lisibilité. L’Histoire produit donc une représentation travaillée, élaborée, alors que la fiction relève de l’imagination pure, qui n’a pas besoin de se référer au réel. Aussi entre Histoire et mémoire, y a-t-il un même souci du passé, le même rejet de l’invention, mais la première cultive, face aux événements, une distance critique que, par nature, la mémoire peine à avoir et à maintenir. Ce problème ne se limite pas à une opposition entre l’objectivité quasi scientifique à laquelle aspire l’historien dans ses recherches, et la subjectivité sélective d’une mémoire toujours connotée, engagée. Il y a ainsi des enjeux de la mémoire auxquels l’historien doit faire face tout en tâchant de s’en abstraire pour construire une relation » la plus juste possible du passé La mémoireest toujours engagée car l’individu met en elle son identité même identité construite au fil d’événements cruciaux de son existence ; engagée aussi, lorsqu’elle est collective, allant de pair avec des revendications tout aussi identitaires, voire politiques, morales. Le problème est classique l’historien a besoin, entre autres choses bien sûr, des différentes manifestations de la mémoire. Histoire et besoin de Mémoire Pour l’historien comme pour celui qui se remémore, l’imagination est donc un outil nécessaire, mais qui appelle la plus grande vigilance, ce qui nous conduit à un autre aspect des relations entre les deux notions. La Mémoire est la faculté de convoquer, de retrouver des images du passé mais, sauf erreur, elle n’en crée pas de nouvelles, et introduit dans la représentation un aspect temporel, dont l’imaginaire pur peut faire l’économie. En effet, en tant que faculté de produire des images, elle intervient dans la représentation et y révèle son caractère ambivalent, surtout concernant la Mémoire. L’imagination s’avère ainsi être un concept aussi crucial que problématique pour penser les relations entre la Mémoire et l’Histoire. D’une part, l’historien se confronte à une mémoire toujours susceptible de défaillir, et ses défaillances possibles sont multiples, allant de l’oubli à la production d’images fictives d’où le problème de la crédibilité des témoins, en passant par la sélection ou l’altération des souvenirs. D’autre part, la mémoire collective a toujours tendance à faire pression » sur l’Histoire, exigeant d’elle une caution scientifique, un travail de légitimation qui n est pas du ressort de l’historien en quête d’une autre légitimité. Ce livre qui pense la pratique officielle et privée du souvenir est intéressant car il appelle à la vigilance. Dans son livre Les abus de la mémoire 2004, Todorov cite Jacques Le Goff La mémoire ne cherche à sauver le passé que pour servir au présent et à l’avenir. Faisons-en sorte que la mémoire collective serve à la libération et non à l’asservissement des hommes ». Ces abus peuvent avoir en effet deux conséquences Todorov les met en exergue dans son ouvrage les abus de la mémoire » Les effets des abus de la mémoire Tout comme la philosophie a été la servante de la religion, l’histoire doit lutter plus que jamais pour ne pas être celle de la mémoire, toujours en proie à la tentation de remplacer une compréhension du passé par la répétition obsessionnelle et compulsive de l’événement qui la hante et la justifie en même temps. D’une part, qu’elle soit individuelle ou collective, une mémoire qui parasite la quête de véracité de la représentation par son caractère traumatique et envahissant, empêche l’individu ou le peuple de prendre en main son présent et d’envisager l’avenir sainement. Les critères de sélection historiques doivent chercher l’indépendance face à de telles influences, au risque de produire une histoire orientée, voire doctrinaire d’un point de vue idéologique. D’autre part, il n’y a pas une, mais des mémoires, qui toutes revendiquent leur légitimité ; et le problème de cette diversité des mémoires n’est pas tant de savoir laquelle est la plus fidèle au passé, que le fait que chacune d’elles a une raison d’être, chacune cherche à faire entendre sa voix.Cf. article sur ce blog de l’exemple des Mémoires sur la guerre d’Algérie. Il semble qu’il appartienne à l’historien, et qu’il soit même de son devoir, de se positionner face à la tendance naturellement envahissante de la mémoire. Il doit réaffirmer son rôle critique, le caractère indépendant de son travail, qui relève d’une discrimination de la mémoire et du souvenir. En ce sens, la mémoire reste un outil essentiel de la recherche historique, et reste l’objet aussi de l’histoire, mais ne saurait en devenir le sujet ou l’initiatrice. En parallèle je vous livre quelques auteurs référents sur ce thème et qu’il serait bon de lire avant le jour J ». Les Penseur » de la mémoire en historien Rôle critique de celui qui cherche, non pas simplement à convoquer le passé, mais à l’élucider, le mettre en lumière, au service d’une connaissance compréhensive des événements historiques, au service aussi d’une disponibilité plus consciente et avertie à notre propre présent. Il y aurait encore nombre d’histoires » à raconter au sujet de ce couple tumultueux, mais il faut, du moins provisoirement, solder leurs comptes respectifs et communs. Conclusion Il est important de rappeler en dernier lieu que l’histoire est science, mais science humaine, et qu’il lui est donc aussi nécessaire, pour ne pas être une simple chronologie, pour ne pas forcer non plus la raison des événements, de se confronter aux mémoires du passé comme du présent. Faire et enseigner l’histoire des mémoires à l’œuvre dans ces mêmes sociétés, peut s’avérer, dans ces conditions, un travail aussi passionnant qu’il est essentiel. Il semble en effet que toute société mette en place suffisamment de relais de transmission de la mémoire, pour laisser l’historien, dans ses recherches comme face à ses élèves, ses étudiants, ses lecteurs et ses pairs, faire et enseigner l’histoire. Si la mémoire se transmet, l’histoire s’enseigne. Ce dernier serait d’ailleurs en mesure de faire une histoire des mémoires qui, dans leur évolution, leurs conflits, les processus qu’elles traversent, ont tous les caractères de l’objet historique. Or l’historien n’est le médium d’aucune mémoire, dont les relais sont d’une autre nature ; l’émergence de l’une, la prééminence ou le silence des autres, toutes ces manifestations répondent à des conditions politiques et à des intérêts qui ne sont pas ceux de l’historien. L’historien, fondateur de mémoire chez Jules Michelet L’histoire, mémoire de l’humanité la pensée de Charles Péguy Paul Ricœur, penseur d’une mémoire historique apaisée Ouvrage à lire Les Lieux de mémoire de Pierre Nora
Leçon(doc. du professeur) Diapo - Faire la paix par les traités (de Westphalie à Versailles) « Les traités de Westphalie » (France Culture, 2018) La Guerre de Trente ans (9' - Spoils d'histoire) Diapo - Faire la paix par la sécurité collective (l'ONU de Kofi Annan)
Soixante ans après l'indépendance de l'Algérie, les acteurs et héritiers de cette guerre peinent à s'entendre autour d'une histoire douloureuse et conflictuelle. Franceinfo a interrogé l'historien Benjamin Stora, auteur d'un rapport sur ces questions mémorielles."Il ne s'agit plus de déchiffrer pas à pas un destin déjà écrit au ciel mais d'écrire le présent comme une histoire que les siècles futurs sauront lire", écrit Alice Zeniter dans son roman L'Art de perdre, qui retrace l'épopée d'une famille de harkis durant la guerre d'Algérie. Soixante ans après la signature des accords d'Evian, le 18 mars 1962, qui proclamèrent un cessez-le-feu et ouvrirent la voie à l'indépendance de l'Algérie en juillet, les acteurs de cette guerre et leurs descendants continuent de se diviser sur cette histoire douloureuse. Quelles sont les traces et les effets des mémoires de la colonisation et de la guerre d’Algérie sur la société française ? Quel statut donner aux souvenirs de chacun ? Comment écrire un récit commun ? Franceinfo a interrogé l'historien Benjamin Stora, auteur d'un rapport sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie. Il est également l'auteur de France-Algérie, les passions douloureuses 2021, Albin Michel. Franceinfo En France, combien de personnes sont aujourd'hui concernées par la guerre d'Algérie ? Benjamin Stora Parmi ceux qui ont vécu la guerre d'Algérie, il y a le groupe le plus important, celui des appelés du contingent. Plus d'un million et demi de soldats ont été envoyés de métropole en Algérie. Ensuite, il y a eu un million d'Européens d'Algérie, les pieds-noirs. Pendant la guerre, il y avait déjà 400 000 immigrés algériens en métropole, auxquels s'ajoutent 500 000 autres Algériens venus après l'indépendance. En 1962, il y avait donc en France environ 3,5 millions de personnes nées en Algérie ou qui y ont vécu. Il faut bien sûr ajouter le groupe important des harkis supplétifs musulmans de l’armée française et leurs enfants, soit 200 000 personnes environ, puis tous les gens mêlés, les opposants, ceux qui ont construit leur parti politique durant la guerre, les "porteurs de valise" militants soutiens du Front de libération nationale. Avec les descendants, on estime qu'il y a entre 6 et 7 millions de personnes concernées aujourd'hui en France par la guerre. A l'indépendance de l'Algérie, quelle a été l'attitude de la France vis-à -vis des acteurs de cette guerre ? Très vite, il a fallu tourner la page de cette guerre pour différentes raisons. La France sortait de plusieurs décennies de conflits, la Seconde Guerre mondiale, la guerre d'Indochine, puis la guerre d'Algérie. Il y avait une volonté très nette d'une immense majorité de la population de connaître la paix. Même si la guerre d'Algérie, qu'on a longtemps appelé "les événements", "la guerre sans nom", semblait lointaine depuis la métropole, la France vivait en situation d'angoisse, d'anxiété de la guerre, et il y avait un grand désir d'oubli. Puis les années 1960 marquent le début des Trente Glorieuses, il y a une volonté de consommation, de voyages. La France veut entrer dans la modernité économique. Le général de Gaulle veut réorienter le poids géopolitique de la France vers la construction européenne et l'axe Paris-Bonn Allemagne. Pour les dirigeants politiques, il y a un désintérêt vis-à -vis de l'ensemble des populations du Sud, témoins d'une époque qui représente l'ancien temps, le temps de l'Empire, de la colonisation. Dans votre ouvrage La Gangrène et l'oubli, vous expliquez comment l'Etat a organisé cet oubli… Il y a eu une volonté de l'Etat d'effacer cette histoire. De nombreuses mesures d'amnistie sont instaurées dès 1962. La première figure dans les accords d'Evian, où il est décidé qu'on ne peut pas juger les responsables des exactions commises durant la guerre. Ensuite, il y a la loi de 1968 qui attribue l'amnistie pénale aux militants de l'Algérie française et de l'OAS, et qui leur permet de revenir en France. En 1974, sous Valéry Giscard d'Estaing, des lois effacent toutes les condamnations prononcées pendant ou après la guerre d'Algérie. En 1982, François Mitterrand réintègre dans l'armée française les principaux généraux putschistes, avec grades, pensions et décorations. "Il n'y a jamais eu de procès sur la guerre d'Algérie en France. Personne n'a été poursuivi." Benjamin Storaà franceinfo A l'époque, l'oubli est aussi voulu par la société française. Les personnes qui ont vécu la guerre avaient "intérêt" à oublier, il y avait une volonté de surmonter le deuil, les épreuves. Il n'y a pas eu d'opposition sur ces lois d'amnistie, pas de revendications. La demande d'abrogation de ces textes viendra plus tard avec le réveil mémoriel des enfants et petits-enfants dans les années 2000. Quelle a été l'évolution du discours des présidents français à ce sujet ? Pour le général de Gaulle, Georges Pompidou, Valéry Giscard d'Estaing et jusqu'à François Mitterrand, le discours a été très simple. Il s'est focalisé sur le partenariat économique avec l'Algérie, pays qui restait très important, notamment avec l'exploitation du gaz et du pétrole dans le Sahara. Il y a aussi eu des accords sur la gestion des migrations entre les deux pays. Au début des années 2000, le discours change avec Jacques Chirac. En 2005, l'ambassadeur de France en Algérie, Hubert Colin de Verdière, condamne pour la première fois les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata [répressions sanglantes survenues le 8 mai 1945, en Algérie, pendant des manifestations indépendantistes]. En 2008, à Constantine, Nicolas Sarkozy condamne le système colonial. En 2012, à Alger, François Hollande reconnaît les souffrances infligées par la colonisation. Ces discours sont des gestes de reconnaissance de l'histoire, ils condamnent le colonialisme, mais sans nommer des actes précis. Emmanuel Macron marque-t-il une rupture ? Contrairement à ses prédécesseurs, Emmanuel Macron nomme des personnes et des lieux. Il reconnaît l'assassinat de Maurice Audin [mathématicien communiste militant de l'indépendance de l'Algérie] par le système colonial français, l'assassinat d'Ali Boumendjel, avocat et militant nationaliste. Il reconnaît la fusillade de la rue d'Isly, le 26 mars 1962 contre les Européens, le massacre des Algériens à Paris le 17 octobre 1961, l'abandon des harkis… Il y a un changement de tonalité opéré par des choses concrètes. Cela permet d'avancer de façon pratique dans la connaissance de l'histoire, c'est un changement important. Depuis la remise de mon rapport [sur "les mémoires de la colonisation et de la guerre d'Algérie"] en janvier 2021, il y a eu plus d'actes concrets qu'en soixante ans. Ces gestes sont une réponse à des mouvements citoyens, des associations d'enfants d'immigrés, de harkis, de rapatriés, de pieds-noirs, qui se sont battues durant des années pour qu'on reconnaisse ces événements et ces personnalités. "Ces reconnaissances permettent de nommer les choses. Comme disait Albert Camus 'Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde'." Benjamin Storaà franceinfo Il y a eu aussi l'ouverture plus large des archives, résultat d'une bataille mémorielle livrée par les historiens depuis très longtemps. Bien sûr, il reste encore beaucoup de choses à faire. Dans mon rapport, j'ai proposé également de se pencher sur les essais nucléaires réalisés en Algérie et leurs effets. Je propose d'améliorer l'entretien des cimetières européens en Algérie, de rédiger un guide des disparus pendant la guerre. Quel est l'état de la souffrance des personnes qui ont vécu la guerre et de leurs descendants ? Vous parlez de "communautarisation des mémoires" et de "compétition victimaire". Depuis la fin de la guerre, il n'y a pas eu un discours fort et commun sur la guerre, mais des lois d'amnistie, qui ont provoqué un fort ressentiment. Chaque groupe s'est fabriqué une identité à partir d'un personnage, une date, mais il n'y a pas eu de récit commun. Des fractures existent même au sein de ces groupes. Aujourd'hui, nous sommes certes sortis de l'oubli, mais pour tomber dans une sorte de "guerre des mémoires" qui s'est faite dans le désordre et dans le repli identitaire. Je lis aussi cette situation comme l'affaiblissement des batailles citoyennes qui profitent à un groupe particulier. On est désormais plus habitué à être dans un statut de victime que de combattant. "Chaque groupe souhaite qu'on reconnaisse sa vérité de manière exclusive au détriment des autres. Le grand danger est de ne pas trouver de passerelles, de séparer les mémoires." Benjamin Storaà franceinfo Il faut reconstruire ces passerelles. "Les mémoires divisent, l'histoire rassemble", comme le dit l'historien Pierre Nora. Comment cette mémoire est-elle traitée en Algérie ? Cette mémoire de la guerre s'enracine dans un temps très long, de plus de 130 ans, depuis le début de la colonisation en 1830 jusqu'en 1962. La guerre d'indépendance y est appelée "révolution". La mémoire est anti-coloniale, elle se caractérise par la dépossession des frontières, des massacres, des exactions, des déplacements de populations. Contrairement à la France, il n'y a pas d'aspect positif, c'est une mémoire douloureuse. Après la guerre, différentes mémoires se sont confrontées. Il y a eu d'un côté ceux qui ont été les pionniers du nationalisme algérien – Messali Hadj, Ferhat Abbas – et de l'autre ceux qui ont déclenché la guerre – Mohamed Boudiaf, Krim Belkacem – et qui n'ont pas eu leur place après l'indépendance et ont été écartés de la scène politique. L'Algérie doit se réapproprier le travail des pères fondateurs de la guerre et du nationalisme algérien. Elle doit aussi voir comment elle situe la mémoire française dans son histoire, trouver une place pour les Européens d'Algérie, les Juifs indigènes au sens de l'époque séparés des musulmans par le décret Crémieux. C'est un travail très difficile dont on a commencé à avoir des traces dans les revendications du mouvement Hirak. L'Algérie place la question de l'excuse comme préalable à toute discussion avec la France. Qu'en pensez-vous ? Je ne suis pas contre le principe de l'excuse, mais en général c'est utilisé comme un argument idéologique qui empêche concrètement d'avancer. Tous les grands discours de condamnation ou d'excuses que l'on a pu observer dans d'autres guerres n'ont pas permis de régler l'héritage du passé. Les Japonais ont fait beaucoup d'excuses aux Chinois, aux Coréens, après la Seconde Guerre mondiale, les Américains aux Vietnamiens après la guerre du Vietnam. Cela n'a pas empêché les mémoires de saigner, les revendications de continuer à s'exprimer. "Je suis plus partisan des travaux pratiques que des condamnations morales." Benjamin Storaà franceinfo Il y a des gens qui ne peuvent exister qu'en tenant cette posture. Rester dans le conflit les fait vivre, et ce, des deux côtés de la Méditerranée. Pour moi, il faut avancer sur des actes concrets. J'ai notamment proposé la construction d'un musée d'histoire de France et d'Algérie à Montpellier pour centraliser sur un lieu les savoirs de cette guerre. En France, certains refusent de regarder ce passé colonial en face et avancent le thème de la "repentance". Qu'en pensez-vous ? C'est un discours idéologique, fabriqué et porté par une partie de la classe politique française. Personne n'a jamais demandé de repentance, mais une reconnaissance de ce qu'il s'est passé. Il faut sortir de ce piège par des mesures concrètes, comme celles que je propose dans mon rapport. Que pensez-vous des questions de réparation ? La réparation est nécessaire, mais il faudrait d'abord savoir de qui on parle. Combien de personnes ont disparu ? Combien ont été touchées par les essais nucléaires au Sahara ? Les réparations doivent s'articuler sur des faits argumentés. Une autre forme de réparation pourrait être l'enseignement de la guerre d'Algérie. L'enseignement a commencé à prendre en compte cette histoire depuis une vingtaine d'années. Il faut maintenant s'intéresser davantage à la colonisation.
Desfiches de révision et des exercices interactifs sur tous les points clés de spécialité Histoire-géo.-Géopolitique.-Sciences politiques en terminale. Travailler sur des sujets du bac Des sujets corrigés pour préparer les épreuves de spécialité Histoire-géo.-Géopolitique.-Sciences politiques en terminale.
Accéder au contenu principal Les deux premiers sujets zéro sont publiés le 14 octobre 2020. Ils comprennent un énoncé unique dans chacune de leurs deux parties conformément à la définition officielle de l’épreuve une dissertation en première partie et une étude critique de documents en seconde partie. Un troisième sujet zéro est publié après l’adaptation de l’épreuve 15 novembre. Daté du 16 décembre, il comprend deux énoncés dans chacune de ses parties deux dissertations en première partie et deux études critiques en seconde partie. Les épreuves écrites prévues les 15 et 16 mars 2021 sont annulées le 21 janvier et les sujets sont finalement publiés sur différents sites officiels ou non. Maintenues pour les candidats libres, elles se tiennent les 7 et 8 juin sur des sujets neufs publiés après la fin des épreuves. L’épreuve fait l’objet d’une nouvelle adaptation pour la session 2022 deux dissertations au choix, une seule étude critique. Les sujets des épreuves annulées des 15 et 16 mars 2021 Les sujets des épreuves des 7 et 8 juin 2021 L’adaptation de l’épreuve pour la session 2022 Les sujets des épreuves annulées des 15 et 16 mars 2021 Les sujets des épreuves des 7 et 8 juin 2021 L’adaptation de l’épreuve pour la session 2022 Note du 10 février 2022 Dans son courrier du 28 janvier, le ministre de l’Éducation nationale annonce à la fois le report des épreuves 11-13 mai 2022 et un aménagement des sujets destiné à garantir un choix au un document daté du 10 février, l’épreuve est aménagée de la façon suivante la première partie comporte deux sujets de dissertation au lieu d’un ; ces deux sujets portent sur un thème différent ; l’étude critique de seconde partie porte sur un troisième thème. Mise en œuvre du choix offert aux élèves pour les épreuves terminales de spécialité du baccalauréat 2022 Tableau récapitulatif des sujets Pour un inventaire plus complet des sujets officiels connus Tableau récapitulatif des sujets Annales du baccalauréat en HGGSP Navigation des articles
Axe1: Histoire et mémoires des conflits. les conflits du XXe siècle sont toujours la source de controverses et de débats comme en témoigne le rapport Stora sur la guerre d'Algérie Le rapport de Benjamin Stora sur la colonisation et la guerre d’Algérie, remis à Emmanuel Macron le 20 janvier, cherche à “réconcilier les mémoires” des deux côtés de la Méditerranée, mais la
Durant la guerre d'Algérie 1954 - 1962, l'État français cherche à minimiser le conflit. Suite à l'indépendance, le FLN qui prend le pouvoir en Algérie institue une histoire officielle du conflit dans laquelle sont occultées les divisions au sein des nationalistes ainsi que le rôle des Kabyles. Le pouvoir avance l'idée d'un soulèvement spontané et unitaire du peuple algérien derrière le FLN et contre la France. En France, les acteurs du conflit les soldats, les pieds-noirs rapatriés, les harkis taisent leur expérience du conflit. Le silence concerne aussi l'État qui ne reconnaît pas la guerre. Benjamin Stora parle d'une "guerre ensevelie". Pourtant, les différents acteurs du conflit entretiennent des mémoires différentes voire contradictoires de la guerre. Après le silence vient la période du "réveil des mémoires". Les différents groupes portent leurs revendications et souhaitent faire reconnaître leur vision de l'histoire. Le rôle des historiens est important dans ce "réveil des mémoires". Grâce à leurs travaux, ils ont pu faire la lumière sur le conflit et sur ses zones d'ombre, dont l'utilisation de la torture. À partir de la fin des années 1990, notamment grâce aux travaux des historiens, la France intègre la guerre d'Algérie dans la mémoire officielle. Les archives sont ouvertes, le conflit est reconnu. Malgré la reconnaissance de la guerre d'Algérie, toutes les mémoires ne sont pas apaisées. Certains groupes contestent la mémoire officielle de l'État et l'Algérie réclame encore la repentance. Les historiens sont soumis à des pressions de la part des différents groupes porteurs de mémoires et face à la mémoire officielle. Bien qu'ils doivent être indépendants à l'égard des revendications mémorielles, leur travail fait évoluer les mémoires. En Algérie, la situation a peu évolué. Après une tentative de démocratisation du pays qui échoue, le pays maintient une vision officielle du conflit et continue d'encadrer les travaux des historiens. ILes mémoires de la guerre d'Algérie au lendemain du conflit La mémoire est la présence sélective des souvenirs du passé dans une société donnée. Elle est souvent plurielle et conflictuelle les différents groupes qui ont vécu des événements douloureux se font leur propre construction du passé et ces différentes visions peuvent s'opposer. Les groupes qui portent les mémoires cherchent une reconnaissance dans le présent de leur vision des événements. L'histoire a pour vocation de restituer le passé de la manière la plus objective possible. Elle s'appuie sur une étude critique des sources écrites, orales ou encore archéologiques. Ainsi, mémoires et histoire présentent des différences quant au type de questionnements adressés au passé. Les mémoires veulent réhabiliter, "sauver de l'oubli", alors que l'histoire veut comprendre et expliquer le passé. Même si l'histoire ne doit pas, dans un souci d'objectivité, être soumise aux enjeux des mémoires, il existe de nombreux liens et des interactions entre les deux. AUne guerre sans nom La guerre d'Algérie est considérée comme une guerre sans nom. Elle commence le 1er novembre 1954 suite à une série d'attaques commises en Algérie par le Front de libération nationale algérien FLN. Alors que le conflit s'intensifie, le gouvernement français cherche à minimiser les combats. Il parle "des événements d'Algérie" et décrit l'intervention des forces françaises comme des simples "opérations de police" visant à "pacifier le pays". Les combattants algériens sont décrits comme des "rebelles". Face à cette négation officielle du conflit, des voix discordantes dénoncent le rôle de la France dans la guerre. Le parti communiste, ouvertement anticolonial, dénonce l'intervention française et la torture pratiquée par l'armée française, notamment lors de la bataille d'Alger. Des "comités Audin" se mettent en place dans le milieu universitaire. Cela fait suite à l'assassinat sous la torture du militant communiste Maurice Audin, mathématicien français travaillant à Alger et favorable à l'indépendance algérienne. Des journaux comme L'Express, avec François Mauriac, critiquent l'intervention française. Plusieurs témoignages se font l'écho des pratiques utilisées par les forces françaises, dont la pratique de la gégène. Ainsi, le général Pâris de Bollardière, Henri Alleg, rédacteur de La Question en 1958 ou l'historien Henri-Irénée Marrou dénoncent la torture. Enfin, des intellectuels, des artistes et des universitaires, dont Jean-Paul Sartre, directeur de la revue Les Temps modernes, signent le manifeste des 121 en 1960 pour dénoncer le militarisme français et la torture. Le gouvernement déploie une intense répression à l'encontre de ces oppositions. La Question d'Henri Alleg est interdit et son auteur est condamné à la prison. La police réprime de manière très violente les manifestations dénonçant le conflit. Le 17 octobre 1961, en France, une manifestation pacifique d'Algériens dénonçant le couvre-feu imposé aux Nord-Africains provoque une répression sanglante de la police sous les ordres du préfet Papon. Une centaine d'Algériens sont tués et plusieurs centaines sont blessés. De même, une manifestation pour l'indépendance de l'Algérie le 8 février 1962 aboutit à la mort de 9 personnes à la station de métro Charonne à Paris. BMémoire officielle en Algérie après le conflit L'Algérie devient indépendante suite aux accords d'Évian en 1962. L'armée des frontières branche de l'ALN basée en Tunisie et au Maroc s'impose au pouvoir au détriment du Gouvernement provisoire de la République algérienne GPRA. L'État algérien encadre l'histoire du conflit qui est nommée la "Révolution nationale" ou encore la "Guerre de libération". Le conflit est présenté en Algérie comme un soulèvement spontané du peuple algérien. L'histoire officielle parle de 1,5 million de morts algériens, alors que le chiffre réel se situe autour de 300 000. Le gouvernement minimise les divisions entre les nationalistes algériens pendant le conflit et notamment les luttes entre le FLN et le MNA de Messali Hadj qui a causé plus de 10 000 morts. Le conflit est complètement limité à une opposition entre les Français et les Algériens. Toujours avec pour objectif de mettre en avant l'unité nationale, le rôle des Kabyles dans la lutte contre les Français est passé sous silence tandis que celui de l'ALN est exagéré. Les livres scolaires, les monuments, les commémorations sont des relais de cette histoire officielle. Le travail des historiens est d'ailleurs surveillé par l'État qui contrôle étroitement les recherches scientifiques du Centre national d'études historiques algérien CNEH et encadre en 1972 un travail de rassemblement d'archives orales et écrites du 1965, suite au coup d'État d'Houari Boumédiène, le FLN devient le parti unique de l'Algérie et accentue la diffusion de la mémoire officielle du conflit. L'historien Guy Pervillé parle d'une "hyper commémoration obsessionnelle". Mohammed Harbi, historien algérien et ancien membre du FLN, est condamné pour sa contestation de l'histoire officielle et s'enfuit en France. CLa "guerre ensevelie" En France, après l'indépendance de l'Algérie, le conflit est en revanche passé sous silence. Benjamin Stora parle d'une "guerre ensevelie". Ce sont d'abord les groupes concernés par le conflit qui cherchent à oublier les souffrances et les douleurs de la guerre. Environ 800 000 pieds-noirs sont rapatriés en France. Lorsqu'ils arrivent dans ce pays qu'ils connaissent peu, ils sont démunis, et nombreux sont ceux qui veulent tourner la page. La priorité est à l'intégration. En particulier à cause des attentats commis par le groupe terroriste OAS en France, les pieds-noirs pensent qu'il est préférable de rester discrets. Les Algériens présents en métropole, dont une grande partie arrive dans le cadre de l'immigration de masse organisée par la France, ne veulent pas faire ressortir la mémoire du conflit et les attentats perpétrés par le FLN. L'État français, présidé par de Gaulle, cherche aussi à faire oublier la guerre. La France a perdu l'immense majorité des terres qui composaient son empire colonial. Sa place dans le monde décline depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et l'État veut préserver l'unité nationale. De plus, les violences commises par l'armée française sont en contradiction avec les valeurs d'une France que l'on appelle "pays des Droits de l'homme". En 1968, des lois sont votées pour amnistier tous ceux qui ont pris part au conflit et les soldats qui ont participé au putsch des généraux en 1961 sont réintégrés dans l'armée en 1982. La population française oublie assez vite le conflit, dont aucune mention n'est faite dans les livres scolaires, et les historiens n'ont pas accès aux archives. IILe réveil des mémoires ADes mémoires divisées Le réveil des mémoires n'a lieu qu'à partir des années 1970. Malgré le silence fait sur la guerre d'Algérie au lendemain du conflit, les mémoires des différents groupes concernés sont différentes et parfois opposées. De nombreux pieds-noirs entretiennent une vision idéalisée de leur vie en Algérie, on parle de la "nostalgérie". Les anciens combattants sont victimes de l'oubli officiel du conflit et n'ont pas le droit à la reconnaissance de leur statut. Les harkis, qui ont pu quitter l'Algérie, sont rassemblés dans des camps et ils s'estiment trahis par l'État français. Ceux restés en Algérie ont subi des massacres. Certains militaires défendent le bien-fondé de la guerre et entretiennent l'idée d'un conflit qui s'est inscrit dans la logique de la guerre froide. Ils soutiennent que les méthodes utilisées par l'armée, dont la torture, étaient justifiées. Ils exagèrent aussi le rôle social joué par la France auprès des populations indigènes lors de la colonisation. Enfin, les militants pour l'indépendance de l'Algérie, dont le parti communiste, se souviennent des méthodes utilisées pendant la guerre et de la répression de l'État français lors des manifestations pacifistes. Ils veulent que la France reconnaisse la guerre. B"L'accélération mémorielle" Après une période de silence sur le conflit, les différents groupes mettent en avant leur souvenir et veulent faire reconnaître leurs revendications. C'est le temps de l'anamnèse, c'est-à -dire de la prise de conscience des mémoires refoulées. À partir des années 1970, les "porteurs de mémoires" participent au développement de l'"accélération mémorielle" Les pieds-noirs forment des associations afin de réclamer des indemnités pour les biens qu'ils ont perdus. Ils veulent aussi accéder aux tombes des membres de leur famille enterrés en Algérie. En 1970, une loi leur accorde des indemnisations qui leur semblent encore insatisfaisantes. Les anciens combattants, regroupés dans des associations influentes, dont le FNACA, obtiennent le statut d'ancien combattant en 1974. Les harkis se révoltent en 1975 et 1976 contre leurs conditions de vie dans les camps. Ils veulent une reconnaissance de leur rôle pendant la guerre. Des groupes proches de l'extrême droite et de l'OAS, particulièrement dans le Sud-Est de la France, organisent des manifestations et érigent des stèles en souvenir de "l'Algérie française". Parmi ces personnes, Jean-Marie Le Pen, ancien combattant de la guerre d'Algérie, légitime les méthodes françaises et est accusé par de nombreux témoignages d'avoir pratiqué lui-même la torture. Face à la montée du racisme dans les années 1970 et 1980, la Marche pour l'égalité et contre le racisme, aussi appelée "Marche des beurs", réunit en 1983 des membres de la communauté maghrébine. Pour la première fois, des enfants de harkis et des enfants de membres du FLN marchent ensemble afin de réclamer une réelle place dans la société française. Enfin, en 1983, la guerre d'Algérie est intégrée dans les manuels scolaires. CLe travail des historiens et des cinéastes dans les années 1970 Bien que les archives soient encore difficiles d'accès, des historiens s'emparent du thème de la guerre d'Algérie En 1961, durant le conflit, l'historien Pierre Nora a publié Les Français d'Algérie. Entre 1968 et 1971, le journaliste Yves Courrière entreprend une histoire du conflit dans son ouvrage La Guerre d'Algérie. En 1972, l'historien Pierre Vidal-Naquet publie La Torture dans la République. Il avait déjà publié L'Affaire Audin en 1958. Charles-Robert Ageron publie en 1973 un ouvrage intitulé Politiques coloniales du Maghreb. Des cinéastes s'emparent également du conflit sur lequel ils souhaitent faire la lumière En 1966, La Bataille d'Alger de Gillo Pontecorvo remporte le Lion d'or de Venise, mais le film n'est pas autorisé à sortir dans les salles. En 1972, René Vautier sort Avoir vingt ans dans les Aurès. Ce film raconte l'histoire de jeunes soldats français pris dans l'engrenage de la violence. La génération d'historiens qui travaille dans les années 1960 et 1970 sur la guerre d'Algérie est constituée de personnes qui ont été confrontées directement ou indirectement au conflit. Expliquer le conflit permet de rompre le silence officiel. Certains des historiens ont milité pendant la guerre, et en faire l'histoire constitue pour eux un acte politique. Par exemple, Pierre Vidal-Naquet, qui a milité pendant le conflit contre la torture, continue par la suite son travail historique visant à établir les faits, à les expliquer et à les faire sortir de l'ombre. IIILes sociétés et les historiens face à "cette guerre qui ne passe pas" ALa difficile mémoire officielle en France À partir des années 1990, la France entreprend la reconnaissance officielle du conflit et des pratiques de l'armée française. En 1992, les archives de la guerre sont ouvertes. En 1999, l'Assemblée nationale reconnaît que le conflit était une "guerre". L'utilisation de la torture est aussi acceptée dans la mémoire nationale. D'anciens généraux témoignent de ces pratiques, comme les généraux Aussaresses et Massu. La parole des victimes est aussi reconnue. Louisette Ighilahriz témoigne des tortures qu'elle a subies alors qu'elle avait 20 ans. En 2002, Jacques Chirac inaugure le mémorial national de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie. En 2012, François Hollande, en visite officielle en Algérie, parle de la "souffrance du peuple algérien" et évoque la torture. En 2012 également, la journée du 19 mars devient la journée du souvenir des "victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie" et l'État reconnaît le massacre du 17 octobre 1961. Pourtant, malgré la reconnaissance officielle de la guerre d'Algérie, le conflit des mémoires persiste En 2005, le groupe des "Indigènes de la République" accuse la France d'être encore un État colonial et porte un regard critique sur ses pratiques passées mais aussi actuelles. En 2005, la loi Mekachera fait scandale, car elle propose que soit reconnu le "rôle positif de la présence française en Afrique du Nord". De plus, l'Algérie reproche à la France de ne pas avoir émis des excuses officielles et réclame la repentance de la France. En 2007, à Perpignan, un mur est inauguré, portant les seuls noms des morts européens de la guerre. En 2012, le Front national condamne l'intervention de Nicolas Sarkozy reconnaissant que "la guerre a aussi meurtri les Algériens" et souhaite une condamnation des porteurs de valises du FLN. Par ailleurs, la journée de souvenir des "victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie" est contestée, car elle prend pour référence le cessez-le-feu du 19 mars 1962, et les opposants estiment qu'elle passe sous silence les Européens et les harkis tués après le cessez-le-feu par les Algériens. BEn Algérie, la persistance d'une lecture unique de la guerre Le climat politique change en Algérie au cours des années 1980. Les émeutes de 1980 en Kabylie brisent le mythe d'une unité nationale algérienne. En 1988, la jeunesse algérienne se révolte contre le pouvoir et exige la libéralisation du système politique. Ces révoltes aboutissent à la mise en place d'un processus démocratique, interrompu en 1992 par la junte militaire au pouvoir. L'enlisement du pays dans la guerre civile qui oppose les islamistes à l'armée et fait environ 100 000 morts achève la démocratisation du pays. L'attitude du gouvernement sur le conflit reste la même L'accès aux archives est interdit. Les harkis sont encore perçus comme des traîtres. Les actes de violence reconnus sont limités aux seuls agissements des Français. Le rôle du MNA, ainsi que des Berbères, est occulté au profit du rôle du FLN. Les violences faites par le FLN, notamment contre les civils qui refusaient de payer "l'impôt révolutionnaire", sont ignorées. En 1995, Bouteflika réintègre les pères fondateurs du nationalisme algérien, tels que Messali Hadj, dans la mémoire nationale. Cependant, cette ouverture est rapidement remise en cause. Les historiens sont censurés et leurs communications à l'étranger doivent être approuvées par le ministère algérien de l'Éducation. Lois mémorielles Les lois mémorielles sont des lois déclarant un point de vue officiel sur un événement historique. Ces lois peuvent être seulement déclaratives, c'est-à -dire reconnaître des événements, ou effectives, c'est-à -dire assortir la loi de sanctions loi Gayssot de 1990 punit la négation des crimes contre l'humanité. La loi de 2001 reconnaît publiquement l'existence du génocide arménien et la loi Taubira de 2001 déclare que la traite négrière est un crime contre l'humanité. Enfin, la loi de 2005 prévoit la reconnaissance du "rôle positif" de la colonisation. CLes historiens contre le "présentisme" Dans les années 1990, une nouvelle génération d'historiens, nés après le conflit, travaille sur la guerre d'Algérie. Certains d'entre eux entreprennent des collaborations avec la première génération d'historiens du conflit Raphaëlle Branche publie La Torture et l'armée pendant la guerre d'Algérie en 2001, grâce à un travail réalisé à partir de témoignages et d'archives. Benjamin Stora collabore avec Charles-Robert Ageron et Mohammed Harbi. Sylvie Thénault publie Une drôle de justice en 2001. Tramor Quemeneur rédige une thèse intitulée Une guerre sans "non" en 2007, dans laquelle il se penche sur l'histoire des réfractaires à la guerre d'Algérie. Yann Scioldo-Zürcher montre dans ses travaux que, contrairement à la mémoire développée par les pieds-noirs, l'État français a mis en place des moyens afin d'intégrer les rapatriés d'Algérie dans la société française. Les historiens s'interrogent sur cette résurgence des mémoires et son incidence sur leur travail. En effet, l'historien ne doit pas être soumis aux différents groupes qui veulent ne retenir que certains aspects de l'histoire, voire les modifier. Il ne doit pas céder aux revendications de ces groupes dont les objectifs sont la recherche de la vérité mais aussi la satisfaction de revendications présentes. En effet, les mémoires se nourrissent des travaux historiques. Bien que les mémoires effectuent une approche sélective du travail des historiens, ces derniers contribuent, en montrant la complexité des faits, à apaiser les débats sur les différentes mémoires. Par exemple, les travaux sur les harkis montrent la complexité des raisons de leur engagement en faveur de la France. Dans l'éducation aussi, le lien entre mémoire et histoire est important. L'enseignant peut, grâce à l'histoire, expliquer l'actualité et les différentes mémoires. De plus, la multiplication des journées mémorielles donne au professeur la possibilité d'aborder certains aspects historiques et de donner du sens à son cours. Des historiens rappellent cependant le danger de trop faire appel à l'émotion des élèves au risque de porter atteinte à l'objectivité de l'histoire. Enfin, les mémoires sont aussi un objet d'étude pour les historiens. Pierre Nora a publié Les Lieux de mémoire, ouvrage dans lequel il analyse la construction des mémoires.
2- Axe 1 - Histoire et mémoires des conflits; 3 - Axe 2 - Histoire, mémoire et justice; 4 - Objet conclusif - Histoire et mémoires du génocide des juifs et des Tsiganes; 5 - Divers; Term Thème 4 - Patrimoine ; Term Thème 5 - Environnement; Term Thème 6 - Connaissance; Actualités; Forum; Participants; Plan de l'espace; Fil d'Ariane. Tribu; Enseignants HGGSP NATIONAL -
Nous sommes actuellement en train de faire quelques petits travaux sur LeWebPedagogique. Et si vous en profitiez pour savourer ces derniers instants avant la rentrée ?
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histoire et mémoires des conflits hggsp dissertation